• Un documentaire Indispensable !
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Canal+ a proposé le mercredi 10 Septembre 2014 à 20h55 le documentaire inédit "Liberté, égalité, improvisez !" de Allan Rothschild et Édouard Bergeon. Ce dernier est produit par Mélissa Theuriau.

Faire de l’improvisation une discipline scolaire reconnue, c’est en peu de mots le défi que s’est lancé Jamel Debbouze.

L’improvisation théâtrale peut servir à tous, et en toutes circonstances. Faire de celle-ci une discipline scolaire reconnue par les pouvoirs publics, c’est le défi que Jamel Debbouze, Alain Degois, créateur de la compagnie Déclic Théâtre, et Marc Ladreit de Lacharrière, un homme d’affaires, se sont fixé. Ce documentaire témoigne de leur engagement.



La Fondation Culture et Diversité et Déclic Théâtre se sont lancés dans un pari fou : rendre l’improvisation théâtrale accessible au plus grand nombre en l’instituant comme option scolaire facultative et ce, dès l’école primaire. Le projet prend forme d’un trophée annuel, invitant plusieurs équipes de collégiens à venir disputer le titre « Culture et Diversité » lors d’un championnat de France de match d’improvisation. Cette initiative est mise en place depuis quatre ans maintenant et voici que Canal+ nous propose un documentaire consacré, en partie, à l’arrière décor de cette aventure.

Si vous êtes improvisateurs et que vous n’avez pas encore visionné ce reportage, jetez-vous dessus avec appétence. Il pose une étape remarquable pour la diffusion publique de notre pratique au travers d'une vision large : de l’entraînement de jeunes collégiens en vue du trophée à une joute verbale entre jeunes avocats du barreau de Paris en passant par l'utilisation de l'improvisation en entreprise. Des milieux variés mais - il est toujours utile de le rappeler - l’impro ne connait pas de barrières sociales ; elle tend au contraire à harmoniser le rapport à l’autre.

Au fil de ce reportage il est question de la nécessaire cordialité, du "vivre ensemble" de la confiance comme rempart contre la peur de l'autre. La confiance comme clé en l’avenir, Jamel y croit sincèrement. Plus que jamais il mériterait le titre de grand médiateur : il faut le voir user de sa finesse diplomatique en vantant les mérites de l'impro auprès du premier représentant de l'état.

Nous avions déjà notre porte drapeau en sa personne, mais le drapeau était jusqu’alors illisible pour le grand public. Au milieu de ce constat est apparu "Liberté, égalité, improvisez !" l’artillerie lourde médiatique qui manquait à l’improvisation théâtrale. Nous répétons sans cesse depuis plus de trente ans les bienfaits de notre discipline, ce raout télévisuel est un répit mérité. Enfin, nous avons une carte de visite à tendre à nos voisins, nos familles, nos institutions. Une fine démonstration de la diversité et de l’utilité de notre démarche. Le théâtre sauve des vies, du moins il les rend plus légères. Nous pourrions reprocher au documentaire de s’attarder un peu plus sur l’aspect social que théâtral mais observer la naissance du jeu comme moyen de s’affirmer chez ces collégiens est un régal.

Quelle ironie de voir notre président de la République constater la cruauté d’un vote lors d’un match. R. Gravel et Y. Leduc, les créateurs québécois du concept, ont en effet, réussi à donner un rôle à tous, même aux spectateurs. C’est là tout l'enjeu de la transmission de notre approche : donner aux joueurs les moyens de créer, d'agir avec plaisir sur l'ici et maintenant tout en gardant une certaine honnêteté artistique.

C’est l’imagination produite ou induite par le jeu qui est au cœur de ce spectacle et non les acteurs qui la portent. Cette même imagination qui fait voler en éclat nos cocons de préjugés; celle qui, tout comme ce documentaire, nous donne le pouvoir de construire et de rêver ensemble.
"Mélissa et Jamel sont pro impro à l'école !"

Faire de l’improvisation une discipline scolaire, c’est le défi lancé par Jamel Debbouze, Alain Degois, créateur de la compagnie Déclic Théâtre et "découvreur" de Jamel, et Marc Ladreit de Lacharrière, puissant homme d’affaires. Pour raconter ce combat, la journaliste, et épouse de l’humoriste, Mélissa Theuriau a réalisé un documentaire qui sera diffusé mercredi à 20 h 50 sur Canal+. L’édition du soir a rencontré Melissa Theuriau et Jamel Debbouze. Interview.


Comment est née l’idée d’un documentaire sur le thème de l’improvisation ?

Mélissa Theuriau. En assistant, aux premières loges, à la formation du trio atypique que constitue Jamel, avec son parcours et sa notoriété, un financier, l’entrepreneur Marc Ladreit de Lacharrière et celui que l’on surnomme le Papi de l’association Déclic Théâtre, Alain Degois, qui lui donne des cours d’impro depuis des années. Ce trio qui avait envie de partir au combat et de porter cette matière jusqu’aux pouvoirs publics, était évidemment une matière susceptible de plaire à une chaîne pour qu’elle me suive dans l’aventure.

L’improvisation théâtrale peut-elle vraiment être une voix d’intégration ?

Images à l’appui, on se rend rapidement compte que l’improvisation peut vraiment permettre à des jeunes de trouver leur place aujourd’hui dans cette société de plus en plus inégalitaire. Cette discipline demande finalement assez peu de moyens par rapport à des tas d’autres sports ou activités. Il faut encourager son développement dans les établissements scolaires. L’improvisation permet à des tas de gens de trouver leur place, de prendre confiance, de se réaliser, bref d’être eux-mêmes. Ce sont des valeurs qui nous parlent et qui permettent peut-être à l’éducation de creuser un peu moins les inégalités.

Comment avez-vous construit le documentaire ?

Nous avons voulu suivre, dans un collège de zone d’éducation prioritaire, des collégiens qui suivaient des cours d’impro. La difficulté a été de convaincre un collège, et qu’un proviseur nous accepte. Ce n’est pas simple de venir aussi régulièrement et de perturber une classe pendant un an ! Il a aussi fallu convaincre les familles de ces enfants qui sont parfois d’un milieu un peu fragile, qui ont des difficultés familiales. C’est à Bordeaux qu’on a obtenu l’accueil et la possibilité de s’installer. Loin de Paris, de Trappes dont on connaît les affinités d’impro. Ça s’adressait à tous. Voilà comment s’est basé notre choix, sans savoir qu’ils allaient gagner le trophée des collégiens et sans savoir si ces enfants allaient ou pas accrocher et aimer l’impro. C’était un pari pour nous aussi, journaliste.

Qu’en est-il du développement de cette nouvelle "discipline" ?

Aujourd’hui, grâce au savoir-faire et au dynamisme des équipes de Déclic Théâtre et à la fondation Culture et diversité, cinq villes en France accueillent déjà des cours d’improvisation dans certains de leurs collèges, Paris, Rochefort, Bordeaux, Trappes, Lille. Et, à la rentrée prochaine, il y aura huit villes en tout, dont Rennes. Donc, cela progresse. Ils espèrent, en 2018, arriver à 36 villes de France, ce qui commencerait déjà à se démocratiser, à permettre à des tas de collégiens d’aller s’essayer à l’impro. Ce que je trouve intéressant dans l’écoute et l’accompagnement du ministère de l’Éducation nationale, c’est d’avoir envie de l’intégrer à la réforme des rythmes scolaires dont on parle beaucoup et de pouvoir proposer l’option dès le primaire.

Comment se retrouve-t-on avec le Président Hollande dans son film ?

Nous avions réussi à le sensibiliser et il avait promis de venir assister à la finale nationale des « battles » d’impros qui rassemblent les représentants des collèges de cinq villes de France. Nous n’avons su qu’à la dernière minute qu’il serait là : ce rendez-vous n’était évidemment pas inscrit dans l’agenda présidentiel. Nous nous sommes adaptés à la situation. On a gardé cette séquence parce que je la trouve intéressante. J’avais mis un micro HF à Jamel qui participe, de fait, à ce film, mais pas au Président. Les deux prennent place, côte à côté, dans la petite tribune. Du coup, ne se sachant pas filmé ou entendu, François Hollande avait une parole libre. On sent la curiosité de l’homme dans sa manière de poser des questions à Jamel qui s’est lui réalisé grâce à l’improvisation. Cette séquence montre l’intérêt au plus haut niveau du pouvoir pour l’improvisation. Pour nous, c’est formidable.

Sur quoi repose le génie de l’improvisation de Jamel Debbouze ?

Ce que l’improvisation offre, et je m’en rends compte forcément un peu plus puisque je partage sa vie, c’est la capacité de s’assumer, y compris quand on ne sait pas, y compris quand on n’a pas confiance en soi, et y compris quand on ne s’aime pas au départ. C’est très important aujourd’hui de pouvoir dire à des gamins : "Si tu bégayes, si tu es en surpoids ou si tu as un handicap quelconque, cela deviendra une force dans l’impro". Elle permet à tous les enfants, les adolescents et même les adultes de se trouver une place en tant qu’être et non pas en jouant à être. C’est ce que Jamel dit très bien dans son parcours personnel et ce qu’il continue d’ailleurs d’utiliser chaque jour. Je pense aussi que c’est une réponse qui permet d’éviter quelques séances chez le psy ou de prendre moins de médicaments.


Ouest France, L'Edition du Soir - 9 Septembre 2014


À l’école, en entreprise, lors d'un entretien d’embauche ou encore à la tête d'une équipe, nous vivons tous des situations réclamant prestance, repartie et assurance. Marc Ladreit de Lacharrière, Jamel et Alain "papy" Degois en sont convaincus : un jeune formé à l’improvisation développe des qualités précieuses et concrètes, essentielles dans le monde du travail. D’ailleurs, si l’art de l’élocution et de l’esprit d’à-propos est depuis longtemps au centre de concours organisés par la Conférence des avocats du Barreau de Paris, les techniques de l’improvisation théâtrale sont aujourd’hui utilisées en entreprise pour former notamment ceux qui doivent réagir au quart de tour.

L'impro est aussi un outil d’intégration qui brise les barrières et les codes. Elle permet d’être soi-même sans se soucier du jugement de l’autre. On parle, indirectement, d’un outil essentiel pour nous aider à trouver une place dans ce monde. Dans un monde où les inégalités sont chaque jour plus flagrantes, donner à tous les jeunes l'accès à l’improvisation s'avère un moyen d’équilibrer leurs chances de réussite, quel que soit leur milieu social ou culturel.

À Bordeaux, Lille, Paris, Trappes, Rochefort, des ateliers d’impro sont déjà proposés aux élèves dans plusieurs collèges. Le travail réalisé dans celui d’un collège bordelais constitue le fil rouge de ce documentaire produit par Mélissa Theuriau et réalisé par Allan Rothschild et Édouard Bergeon. Il rend compte de ce que le jeu théâtral a apporté à ces adolescents dans leur vie personnelle et aussi en classe. Tout au long de l’année, ils rencontrent d’autres collégiens sur scène dans le cadre des matchs du Trophée d’improvisation organisé par la Fondation Culture et Diversité. Jusqu’à la finale qui s’est déroulée à Paris en présence du président de la République. En attendant de savoir si l’improvisation est, réellement, utile dans la vie de tous les jours, François Hollande semble déjà séduit par l’idée. On se rappelle qu’au mois de mai dernier, le président de la République avait été aperçu à la finale d’un concours d’improvisation, organisé... par Jamel Debbouze.